Publié le 08/12/2015 Mobilité urbaine : grandes manœuvres pour fiabiliser les trottinettes électriques et les gyropodes
La France est à l’origine d’une initiative européenne qui aboutira en 2018 à une norme volontaire apportant des gages de sécurité pour les trottinettes électriques et gyropodes. Un cadre d’utilisation sera aussi dessiné pour ces nouveaux moyens de mobilité urbaine.
Après le vélo électrique, c’est au tour des trottinettes électriques et des gyropodes, (incluant les gyroroues), de susciter l’intérêt des consommateurs friands d’alternatives de mobilité urbaine. Ces véhicules légers électriques sont pourtant commercialisés sans tests préalables du fait de l’absence de méthodes harmonisées et partagées. Des directives européennes existent bel et bien)1, mais elles ne fixent pas de cadre spécifique pour ces engins et n’empêchent pas la mise sur le marché de produits non performants, voire dangereux. « Décathlon nous a sollicités dès 2013 pour partager avec nous cet état de fait : l’absence de norme technique spécifique conduit chaque fabricant à tester ses produits selon ses propres critères. Les garanties de sécurité et de performance affichées ont de ce fait une portée limitée…» expose Emmanuel Husson, chef de projet normalisation AFNOR et secrétaire du groupe de travail européen. « Ce fabricant français a adopté une approche offensive en optant pour la normalisation. Il a accepté de partager son protocole d’essais comme base de travail pour la future norme européenne. »
ANTICIPER LA REGLEMENTATION
C’est bien là l’un des leviers de la normalisation. Elle permet aux acteurs d’un marché, dans toute leur diversité, d’initier une démarche d’autorégulation. Avec cette norme d’application volontaire, les fabricants prennent les devants de la réglementation. Honda (via sa filiale Belge), Toyota (par son implantation française), Egret (Allemagne), L-Trott (France) et Trikke (Pays-Bas) l’ont bien compris et participent activement aux travaux. Des représentants des pouvoirs publics (dont la DGCCRF pour la France) et des consommateurs (ANEC) sont également présents. « Ces derniers ont des exigences très élevées en matière de sécurité » ajoute Emmanuel Husson.
SECURITE DU PRODUIT ET CONDITIONS D’USAGE
La future norme européenne concernera les trottinettes électriques sans sièges et les gyropodes, avec ou sans sièges, destinés à un usage urbain. Ce qui exclue les applications rattachées à l’univers de la santé (cadrées par la norme EN ISO 13482).
Un volet technique proposera des méthodes d’essais, pour mettre à l’épreuve les composants mécaniques et électriques du véhicule. Tests de freinage, des pneus, de la batterie, de la barre de direction, solidité de la plateforme pour les pieds… Tous les aspects du véhicule seront concernés pour assurer un niveau minimum de sécurité et limiter les accidents liés au matériel.
Concernant l’usage, la norme volontaire exclura les véhicules dont la vitesse maximale est supérieure à 25 km/h. Seront concernés les engins conçus pour être utilisés dans l’espace privé mais également les aéroports, les bibliothèques ou les grandes entreprises… Dans l’espace public, ils sont d’ores et déjà tolérés sur les pistes cyclables et les trottoirs à une vitesse maximale de 6 km/h. « Au regard de la tolérance accordée, les membres du groupe de travail ont anticipé une éventuelle future règlementation avec l’ajout d’un bouton spécifique pour passer en mode piéton », précise Emmanuel Husson, avant de poursuivre : « La grande majorité des fabricants propose déjà un système de régulation de la vitesse qui pourrait être utile si le législateur imposait à l’avenir une vitesse maximale à respecter ».
La future norme volontaire sera proposée en enquête publique avant l’été 2017, permettant à tout un chacun de découvrir le projet et le commenter.
ET LE MARCHE ASIATIQUE ?
« La lutte est intense entre l’Europe et l’Asie, c’est évident », nous confie Emmanuel Husson. Les fabricants chinois ont une stratégie très agressive et proposent des produits à des prix bien inférieurs. « Selon leurs concurrents européens, ils ne proposent pas de garanties de sécurité suffisantes. » Une initiative au niveau de l’ISO, pour disposer d’une norme internationale, n’est donc pas à écarter.
> Pour rejoindre la commission française et participer au projet de norme européenne…
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1 La Directive 2006/42/CE dite « Directive Machine » , la Directive 2006/95/CE dite « Directive Basse Tension » et la Directive 2014/30/UE sur la compatibilité électromagnétique.
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